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Numéro
Pédagogie Médicale
Volume 19, Numéro 4, Novembre 2018
Page(s) 181 - 198
Section Références
DOI https://doi.org/10.1051/pmed/2019027
Publié en ligne 11 décembre 2019

© SIFEM, 2019

Introduction

« Le vingt-et-unième siècle place les facultés de médecine devant une série de nouveaux enjeux : améliorer la qualité, l’équité, la pertinence et l’efficience des services de santé, réduire le décalage avec les priorités ressenties et avérées de la société, redéfinir les rôles des professionnels de la santé, apporter la preuve d’impact sur le niveau de santé de la population » (extrait du Consensus mondial pour la responsabilité sociale des facultés de médecine) [1].

Au cours de ces cinq dernières décennies, des changements considérables ont eu lieu dans l’éducation des professionnels de santé, notamment dans les méthodes d’enseignement, d’apprentissage et d’évaluation, essentiellement provoqués par l’analyse critique de la recherche en formation médicale et les théories sous-jacentes de l’éducation [2,3]. L’évolution d’un environnement favorable à l’application de nouvelles méthodes d’apprentissage, notamment avec l’usage de nouvelles technologies de la communication, a conduit effectivement à vouloir définir le profil du professionnel de la santé le plus pertinent au contexte (« fit for purpose ») [4]. Durant le vingtième siècle, le développement de la médecine et du système de formation médicale a largement reposé sur la techno-science, la spécialisation et la certification par les pairs. Alors que cette approche a produit des effets très positifs à la fois sur le système de soins de santé et la formation des cadres, elle a également contribué à leur fragmentation et à une discordance entre l’un et l’autre. La société a certes bénéficié des actions de praticiens et formateurs éminemment compétents, mais l’impact de leurs actions sur les besoins prioritaires de santé de la population ne fut pas à la hauteur, en particulier pour les populations les plus déshéritées.

À la fin du vingtième siècle, Ernest Boyer, un des penseurs les plus brillants en matière de formation, fit l’observation suivante : « La crise de notre temps n’est pas tant dans le domaine technique que dans le manque de perspective sociale et historique et le malencontreux divorce entre compétence et conscience » [5]. Alors que l’on s’intéresse de façon plus incisive aux déterminants sociaux de la santé, on peut s’interroger sur le bien-fondé d’un comportement qui consisterait à traiter les maladies des personnes que l’on renverrait ensuite dans le milieu qui les a rendues malades. Cette prise de conscience apparut véritablement quand des initiatives relatives à la responsabilité sociale prirent forme au début de ce siècle. Des actions furent menées à travers le monde, au niveau local, comme aux Philippines, au niveau régional avec l’initiative de facultés de médecine francophones, comme au niveau mondial, avec le Consensus mondial sur la responsabilité sociale des facultés de médecine. Le message central de chacune de ces initiatives a consisté à avoir une ambition clairement affirmée pour les facultés de médecine d’« [...]orienter la formation qu’elles donnent, les recherches qu’elles poursuivent et les services de santé qu’elles dispensent, vers les principaux problèmes de santé de la communauté, région et/ou nation qu’elles ont comme mandat de desservir. Les principaux problèmes de santé seront identifiés conjointement par les gouvernements, les organismes et les professionnels de santé et le public » [6].

Le Consensus mondial s’inspira d’expériences de toutes les régions du monde, à des niveaux de développement différent, afin de définir plus précisément les implications pour les institutions, organisations et systèmes d’accréditation qui s’engageraient à concrétiser cette vision. Au cours du temps, un peu partout dans le monde, il apparut que les systèmes de santé et de formation médicale se sont distancés l’un de l’autre. Le rapport du Lancet Commission Health Professions for a New Century [7] mit en évidence les conséquences de ce schisme et de la fragmentation au sein de ces systèmes, notamment un accroissement des dépenses de santé sans proportion de gain en matière de qualité, équité, pertinence et coût-efficacité des services de santé. En somme, ces systèmes ne se sont pas suffisamment rendus responsables devant les sociétés qu’ils avaient mandat de servir.

Ce guide tente de faire état des travaux entrepris par de nombreuses personnalités et organisations motivées à changer le cours des événements, et partage des expériences et méthodes pour faire évoluer nos actions vers davantage de pertinence sociale et vers des niveaux de responsabilité sociale de plus en plus élevés. Notons que trois stades de responsabilité sociale sont identifiés : stade 1 (social responsibility des anglophones), stade 2 (social responsiveness), stade 3 (social accountability). Des détails sur ces trois stades sont exposés plus loin. Cette démarche vise à aller au-delà de bonnes intentions et à transcender des domaines généralement établis en silos pour une approche globale comprenant à la fois la conception du profil idéal des professionnels de santé, la formation des ceux-ci et la garantie qu’ils pourront être utilisés effectivement pour servir les besoins de santé de la société. Cette démarche a aussi l’ambition de mesurer l’impact sur les priorités de santé.

Ce guide s’inscrit dans la perspective historique cherchant à améliorer la contribution des institutions académiques au bien-être de l’ensemble des citoyens, alors que les principes scientifiques sur lesquels elles étaient fondées depuis plus d’un siècle ont relativement failli par rapport à cet idéal. La science doit retrouver tout son sens dans le service à la société.

Points pratiques

  • Le concept de responsabilité sociale implique l’identification des besoins et défis prioritaires de santé de la société, l’adaptation consécutive de la formation, de la recherche et des prestations de service et la mesure de l’impact sur la société.

  • La responsabilité sociale se réalise par un partenariat durable de l’institution de formation avec les principaux acteurs santé de la communauté locale ou de la région.

  • Une faculté de médecine socialement responsable s’engage à conduire ses programmes de formation, recherche et service en tenant compte des déterminants de santé, de nature politique, culturelle, sociale, économique et environnementale.

  • La formation doit chercher à produire des professionnels de santé possédant un ensemble de compétences approprié pour offrir un service efficient, équitable et de haute qualité.

  • Le but principal de la responsabilité sociale d’une faculté de médecine est de s’assurer que ses actions produisent le meilleur impact possible pour un système de santé performant et un haut niveau de santé de la population. L’effet de ces actions devrait être évalué et pris en compte dans un système d’accréditation. Cette démarche est applicable et adaptable dans toute société, dans tout système de santé et pour tout professionnel de la santé.

Définir la responsabilité sociale

Depuis plus de deux décennies, on note un intérêt croissant pour le concept de responsabilité sociale des facultés de médecine, notamment depuis la première fois qu’elle a été définie en 1995 [8]. Cette définition a été largement acceptée jusqu’à ce jour comme étant : « […] une obligation d’orienter la formation qu’elles donnent, les recherches qu’elles poursuivent et les services qu’elles dispensent vers les principaux problèmes de santé de la communauté, région, et/ou nation qu’elles ont comme mandat de desservir. Les principaux problèmes de santé seront identifiés conjointement par les gouvernements, les organismes et les professionnels de la santé et le public ».

Cette définition est largement référencée dans la littérature et a été adoptée par de nombreuses facultés et organisations à travers le monde. Le Consensus mondial sur la responsabilité sociale des facultés de médecine [1] a réaffirmé la pertinence de cette définition. Par la suite, une taxonomie fut élaborée pour distinguer les trois stades de la responsabilité sociale, le stade ultime étant de démontrer l’impact que l’institution a pu avoir sur la santé de la société. Boelen et ses collègues ont apporté des précisions à ce sujet [9,10]. Une définition des trois stades est proposée dans le tableau I.

Sur l’échelle de responsabilité sociale, le stade 1 (responsabilité sociale – social responsibility) est défini comme une conscience intuitive du devoir à répondre aux besoins de la société, laquelle est partie prenante du système de santé. Dans un tel cas, la formation s’inspire de façon implicite des besoins de santé des personnes et des populations, et des enseignements spécifiques sont proposés sur les politiques de santé publique et les déterminants de santé. Plus avant sur l’échelle, le stade 2 (adaptabilité sociale – social responsiveness) s’appuie sur une identification explicite et documentée des besoins de santé de la société et entreprend en conséquence de façon volontariste une suite cohérente d’actions pour y répondre. Ici, la formation est guidée par un profil de compétences du futur médecin, déterminé par une analyse de l’évolution des besoins de santé et du système de santé. Un plan précis prévoit une mobilisation de ressources humaines, techniques et financières pour permettre aux étudiants d’atteindre les compétences identifiées, prévoyant qu’ils passent une bonne partie de leur temps à apprendre sur le terrain, au sein de la communauté, et à y participer dans des actions de santé. Les missions de la faculté en matière de recherche et de prestation de service sont revues de la même manière pour plus de pertinence sociale. Enfin, le stade le plus élaboré, le stade 3 (redevabilité sociale – social accountability), est un engagement unanime de la faculté envers la société et pour un partenariat durable avec les principaux acteurs de santé dans un territoire, l’objectif étant d’avoir un meilleur impact sur la qualité des futurs diplômés, sur la performance du système de santé et sur le niveau de santé de la population. À chacun de ces stades, la démonstration devra être faite des progrès accomplis. L’évaluation est en effet un point central dans le concept de responsabilité sociale, tant pour démontrer que les actions entreprises conduisent à des résultats probants que pour s’assurer que l’ensemble de la démarche aboutit, en fin de course, à un état de bien-être amélioré des personnes et des populations. L’échelle de responsabilité sociale avec ses trois stades sera documentée plus loin dans le guide.

Le document du Consensus mondial résulte d’une initiative sans précédent menée auprès d’un groupe international de référence composé de 130 experts et représentants d’organisations concernées par l’éducation médicale et la gouvernance des facultés de médecine, avec le soutien de certaines organisations mondiales, telles que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Le document est l’aboutissement d’une étude ayant utilisé la méthode Delphi, étalée sur une période de huit mois, au cours de laquelle un processus itératif de consultation impliqua des personnalités issues de toutes les régions du monde et dont la rédaction finale eut lieu lors d’une conférence animée par un arbitre extérieur au domaine étudié.

Le document du Consensus propose 10 axes stratégiques qui devraient permettre à une faculté de devenir « socialement responsable » selon les définitions énoncées plus haut. Elle démontrerait ainsi les quatre aptitudes suivantes :

  • répondre aux besoins et défis de santé actuels et futurs de la société ;

  • réorienter en conséquence les priorités de l’éducation, de la recherche et des services ;

  • renforcer sa gouvernance et son partenariat avec les autres acteurs de santé ;

  • utiliser l’évaluation et l’accréditation pour apprécier sa performance et son impact.

La publication princeps de Boelen et al. [11] note que « l’excellence devrait être reconnue aux institutions démontrant leur impact sur le bien-être de la population. Les diplômés qu’ils forment ne devraient pas seulement avoir acquis, à la sortie de la faculté, toutes les compétences pour améliorer la santé des citoyens et de la population, mais devraient également être en mesure de les appliquer par la suite dans leur pratique professionnelle. Les quatre valeurs énoncées par l’OMS de qualité, d’équité, de pertinence et d’efficience servent de référence pour édifier un service de santé auquel a droit tout individu et toute société. Ainsi, les déterminants sociaux, économiques, culturels et environnementaux de la santé devront-ils guider le développement stratégique d’une institution de formation ».

Boelen et al. [11] notent aussi que la responsabilité sociale devrait comprendre des fonctions de conception (C), de production (P) et d’utilisabilité (U) des diplômés, telles que définies dans le modèle CPU pour évaluer le degré de responsabilité sociale de l’institution, c’est-à-dire, d’apporter la démonstration des effets produits par ses actions de formation, plutôt que de s’en tenir à énoncer les processus utilisés. « Pour être pleinement socialement responsable, une institution réclamera le droit de s’interroger si “ces produits”, à savoir ses diplômés, ses modèles de service et les résultats de ses recherches, sont utilisés au mieux dans l’intérêt du public ». Ce modèle CPU est décrit plus loin dans le guide.

En somme, la responsabilité sociale des facultés de médecine se résume à cette triade : comprendre les besoins prioritaires de santé, prendre des actions appropriées pour y répondre et s’assurer de l’impact sur une communauté, une région ou un pays. Ceci nécessite de travailler en partenariat avec les principaux acteurs de santé, notamment, les décideurs politiques, les organisations de santé, les associations de professionnels de santé et la société civile.

Tableau I

Echelle de responsabilité sociale.

Motivations à devenir socialement responsable

Agir sur les déterminants de santé

Les déterminants sociaux de la santé, tels qu’un environnement sain, des revenus suffisants pour chacun, un sentiment du bien vivre ensemble, une bonne éducation, une nutrition équilibrée, l’accès à des services de santé et sociaux de base jouent un rôle plus considérable pour la santé que n’importe quel système national de santé [12]. Par exemple, une étude récente a montré qu’aux États-Unis si chaque citoyen était diplômé d’une école secondaire, davantage de vies seraient sauvées que si tous les fumeurs du pays arrêtaient de fumer [13]. Au Nouveau Mexique, dans le sud-ouest des États-Unis, la population autochtone jouit d’un des meilleurs dispositifs de dépistage et de traitement du diabète mais souffre néanmoins du plus fort taux de mortalité due à cette maladie. De bons services de soins n’entraînent pas nécessairement une meilleure santé. En effet, en dépit du budget considérable alloué au système de santé – dont on sait qu’il ne contribue que pour 10 % d’une population en bonne santé – les causes profondes de la santé dans la société, à savoir les déterminants sociaux, continuent à être à l’œuvre, comme le montre le taux élevé de chômage, d’éducation rudimentaire, de marginalisation sociale, d’alimentation malsaine, d’obésité, dont souffrent les populations autochtones d’Amérique du Nord.

Professionnels de santé et responsabilité sociale

Dans la plupart des pays, on constate un écart important entre la qualité et la quantité des diplômés sortis des institutions académiques et la satisfaction des besoins prioritaires de santé de la société. Par exemple, la migration des médecins des pays pauvres vers les pays riches reste élevée, laissant les pays « donateurs » avec peu de ressources pour leur développement. Par ailleurs, la production pertinente et la distribution géographique équitable des ressources humaines de la santé dans un pays sont des marqueurs importants de responsabilité sociale, non seulement pour garantir un accès aux services de santé, mais pour permettre le développement économique et social, qui doit être soutenu par la présence permanente et adaptée d’une main d’œuvre sanitaire [7]. De plus, en dépit des investissements publics considérables dans les services de santé, peu d’études sont faites sur leur impact social. Les raisons à cela sont nombreuses mais en ce qui concerne la faculté de médecine, elle concentre souvent ses actions sur des soins sophistiqués et coûteux pour des patients hospitalisés, aux dépends de services plus abordables de prévention et de soins ambulatoires. Un autre obstacle à exercer sa mission sociale réside dans la grande fragmentation de l’institution, que ce soit au niveau des composantes (départements, spécialités, sous-spécialités) ou des fonctions (formation, recherche et service). Pour que l’institution puisse exercer pleinement sa responsabilité sociale, chacun de ses éléments constitutifs doit partager une même vision et chercher à travailler en synergie avec un regard ouvert sur le monde extérieur pour un plus grand impact sur la santé de la population. À défaut de cette ambition, le concept de responsabilité sociale risque de rester une invocation sans grande conviction, laissée à l’une ou l’autre personnalité, groupe ou unité particulière, servant éventuellement de faire valoir auprès du public ou de la communauté environnante.

Enfin, un des freins majeurs tient aux mécanismes incitatifs traditionnels qui encouragent certains comportements des institutions académiques. Ainsi, les missions de prévention, la pratique des soins de santé primaires et le travail en équipe de santé multi-professionnelle ne reçoivent pas toute la reconnaissance souhaitée. De plus, peu de membres de l’institution sont préparés et motivés à travailler en partenariat avec d’autres acteurs de santé sur des objectifs prioritaires de santé dans un territoire, signe pourtant important de responsabilité sociale, car la mise en place d’un tel engagement prend du temps, exige de la disponibilité et est honoré de peu de prestige. Les professions de santé étant très souvent auto-régulées, on peut s’attendre à ce qu’elles éprouvent un malaise à être soumises à quelque forme de régulation extérieure, avec droit de regard de la communauté ou imputabilité de l’institution par rapport à des priorités de santé. La relation entre professionnels de santé et le besoin de responsabilité sociale est décrite dans la figure 1.

thumbnail Fig. 1

Les fondements de la responsabilité sociale des facultés de médecine (d’après Rourke [14]).

Des premiers signes de changement

Un engagement de l’ensemble de l’institution académique avec ses différents départements et unités envers la population est indispensable. Un tel mouvement exigeant de rendre des comptes à la société apparaît progressivement [15]. Le mouvement « the evidence-based practice » et sa résonance internationale en est un témoignage [16].

On sait la faible corrélation entre les dépenses de santé et la santé effective de la population. Prenons le cas des États-Unis, où les dépenses de santé par personne dépassent celles de n’importe quel autre pays au monde, soit 18 % du produit national brut, et relèguent pourtant le pays au 37e rang du classement de l’OMS pour la santé de la population [17]. Parmi les raisons, on identifie le faible financement des soins de santé primaires par rapport aux spécialités médicales, la grande disparité socio-économique dans la société, et le peu d’engagement pour un filet de sécurité sociale. La loi sur l’accès aux soins (« Obamacare ») a tenté de répondre en partie à ces préoccupations [18]. Un autre indice de changement aux États-Unis fut le souci affiché de certains contribuables, avec le soutien du gouvernement de l’époque, pour un budget de santé global et une capitation, soit le remplacement du paiement à l’acte par une assurance santé pour chaque citoyen. Suivant ce scénario, les assureurs seraient motivés à garder la population en bonne santé, notamment en agissant sur les déterminants sociaux et par le dépistage, et verraient dans la responsabilité sociale l’opportunité de faire du « business ». Auquel cas, il reviendrait à l’institution académique de préparer ses diplômés à cette future réalité par une formation à une pratique multi-professionnelle orientée sur la santé, ce qui n’est pas le cas. Cependant, dans un certain nombre d’institutions nord-américaines, dans la perspective d’appuyer une pratique socialement responsable, des agents de santé (« health extension agents », une forme d’agents de santé de village) sont formés et recrutés pour des services de santé de proximité, suivant ainsi un modèle en vigueur dans certains pays en voie de développement [19], déjà utilisé dans le domaine agricole [20]. C’est un modèle combinant apprentissage et services à la communauté [21].

Initiatives nationales et internationales

La reconnaissance de l’importance de la responsabilité sociale est également notoire dans des initiatives au niveau national et régional. À l’échelle du Canada, les facultés de médecine s’inspirent des principes de responsabilité sociale [22]. Aux États-Unis, un nombre croissant d’institutions académiques tendent à relier leurs projets aux besoins prioritaires de santé de la communauté environnante (www.healthextensiontoolkit.or) et rejoignent le mouvement Beyond Flexner qui promeut la mission sociale de ces institutions (www.beyondflexner.org). Un réseau international connu sous le nom de The Training for Health Equity Network, dont le mandat explicite est de promouvoir la responsabilité sociale auprès des institutions de formation des professionnels de santé, dans l’hémisphère Nord comme dans le Sud, a contribué à développer un cadre conceptuel permettant aux institutions d’évaluer leur congruence avec les principes de responsabilité sociale [23]. Enfin, une organisation non-gouvernementale, créée en 1979 avec le concours de l’OMS, The Network: Towards Unity for Health, a comme mission d’encourager une formation et une pratique des professionnels de santé conformes aux besoins de santé prioritaires de la population. Le mouvement de responsabilité sociale a trouvé dans cette organisation non gouvernementale un solide partenaire dans ses actions internationales (www.the-networktufh.org).

Comment s’applique la responsabilité sociale à la formation des professionnels de santé ?

Le concept d’une obligation sociale des facultés de médecine était déjà présent dans le fameux rapport d’Abraham Flexner sur l’état des facultés américaines et canadiennes en 1910 [24]. Il fut un ardent pionnier de la préparation des futurs médecins sur des normes de meilleure qualité et recommanda fermement que les fonctions du médecin comprennent un aspect social et préventif, autant qu’individuel et curatif. Il introduisit la notion de besoin social, invitant toute faculté à devenir une entreprise de service public (« a public service corporation »). Son rapport causa la fermeture de 50 % des facultés privant ainsi de service des populations défavorisées. Bien que les recommandations du rapport Flexner ont été bénéfiques pour relever le niveau de formation médicale dans la plupart des facultés de médecine du monde, celles-ci n’ont guère été les championnes militant pour un système de santé juste et efficient, ni pour une formation médicale reflétant de façon équilibrée les dimensions biomédicale, humaine et sociale du service de santé [25].

Le terme « social » est défini de manière différente suivant les pays et les cultures. Par exemple, dans les pays de l’Europe de l’ouest, il évoque une solidarité garantie par des instances nationales de régulation tandis qu’aux États-Unis, il est synonyme d’interférence dans les droits individuels et une menace à l’autonomie. Dans le cas de ce guide, le terme « social » sera compris dans son sens étymologique latin de « socius », c’est-à-dire, l’allié. La société est considérée comme un ensemble coordonné d’interactions entre individus et institutions pour un bien commun. L’historien Toynbee la définit ainsi : « […] l’ensemble des relations entre les hommes. Les composantes de la société ne sont pas seulement les êtres humains mais aussi ce qui les relie. Dans un structure sociale, les individus sont au centre de ce réseau de relations […]… une agglomération de gens ne constitue pas une société, mais une foule. Une foule, contrairement à la société, peut être rassemblée, dispersée, photographiée ou massacrée. » [26].

Ainsi, le défi est d’identifier les besoins et enjeux de santé actuels et futurs de la société, d’agir sur ceux-ci avec toute l’efficience possible et de s’assurer que les interventions entreprises ont le plus grand impact possible sur la société. En 1995, l’OMS a défini la responsabilité sociale [6] dans le même esprit que sa définition de la santé, à savoir « l’état complet de bien-être physique, mental et social » et des déterminants sociaux de la santé, comme étant une palette de causes directes et indirectes de nature politique, démographique, épidémiologique, environnementale, culturelle et économique, agissant de manière positive ou négative sur la santé des personnes et des populations [27].

Récemment, des rapports importants recommandent d’établir un lien explicite entre la mission des institutions de formation des professionnels de santé et les besoins de santé en tenant compte des particularités démographiques, économiques et culturels de chaque société. Ceux-ci émanaient du General Medical Council du Royaume Uni [28], de l’Association des Facultés de Médecine du Canada [29], de la Global Independent Commission du Lancet [7] et du Consensus mondial sur la responsabilité sociale des facultés de médecine [1]. L’idée commune de ces rapports est de former des professionnels ayant les compétences nécessaires pour répondre aux besoins de la société. Ils soulignent l’opportunité pour les facultés d’établir un partenariat solide avec les principaux acteurs afin de faire un meilleur usage de leurs ressources en formation, recherche et dispensation de service, et de jouir ainsi d’un rôle plus déterminant dans l’évolution du système de santé. Certains prétendent même que la responsabilité sociale permet aux facultés de médecine d’être des promoteurs de justice sociale [30].

Le document du Consensus mondial [1] propose des réformes à envisager par les facultés de médecine pour optimiser leur impact sur la santé. L’essentiel des 10 axes stratégiques qu’il propose pourrait s’appliquer aussi bien à toute institution de formation ou tout acteur de santé (Tab. II). Le document est présenté suivant une approche systémique allant de l’étude des besoins jusqu’à la vérification de la réponse à ces besoins. La liste des 10 axes stratégiques suit une séquence logique, commençant par une analyse du contexte social, une identification des besoins et défis de santé, la création de relations pour une action efficiente (axes 1 et 2). L’axe 3 se rapporte au profil de compétences du médecin, parmi les autres professionnels de santé, qui servira de guide à la faculté de médecine pour définir sa stratégique éducationnelle (axe 4). La faculté appliquera cette stratégie et s’en inspirera également pour adapter ses stratégies en matière de recherche et de service (axe 5). Des normes sont proposées pour entraîner l’institution vers un plus haut niveau d’excellence (axes 6 et 7), reconnues par des instances nationales (axe 8). En reconnaissant la pertinence universelle du concept de responsabilité sociale (axe 9), la société dans son contexte particulier reste le meilleur juge des résultats (axe 10).

Tableau II

Les 10 axes stratégiques du Consensus mondial pour la responsabilité sociale des facultés de médecine [1].

Les trois stades de la responsabilité sociale

Alors que chaque faculté de médecine est ou devrait être consciente de sa responsabilité sociale, il reste une confusion quant à ce que cette responsabilité implique véritablement. Malgré la définition clairement énoncée par l’OMS [6], la responsabilité sociale est souvent comprise comme une certaine relation établie avec la communauté, une formation orientée vers ses besoins et les apprentissages au sein de celle-ci, sans pour autant un engagement ferme à répondre à ses besoins [21]. Souvent aussi, elle est limitée à ses missions de formation, avec une moindre attention pour ses missions de recherche et de service. Au cours de ces dernières années, une définition plus élaborée de la responsabilité sociale a été proposée par certains auteurs en distinguant trois stades : stade 1 (responsabilité sociale – social responsibility), stade 2 (adaptabilité sociale – social responsiveness) et stade 3 (redevabilité sociale – social accountability) [31].

Le stade 1 (responsabilité sociale – social responsibility) est la situation suivant laquelle l’institution a une connaissance implicite des besoins et défis prioritaires de santé dans la société. Se fiant à son intuition et à sa mission traditionnelle, elle n’éprouve pas le besoin systématique de consulter les principaux acteurs de santé sur les principales actions qu’elle a à mener ni de savoir si ses programmes de formation, de recherche et de service ont un effet significatif sur la santé de la population. Ainsi, le programme d’études médicales pourrait offrir un apprentissage dans un large spectre de disciplines se référant aux déterminants de santé et à la santé publique, accompagné éventuellement de stages sur le terrain, sans pour autant suivre un cahier de charge prévoyant les compétences essentielles que tout futur diplômé devrait acquérir pour fonctionner de façon optimale dans un service de santé juste et efficient. Encore plus caricatural serait le cas où le programme se limite à des cours théoriques sur les déterminants sociaux de la santé, la santé publique et l’organisation du système de santé.

En progressant sur l’échelle de responsabilité sociale, le stade 2 (adaptabilité sociale – social responsiveness) implique une identification et une priorisation explicites des besoins et défis de santé par une analyse critique des faits et statistiques. Dans ce cas, l’institution est en mesure de déterminer de façon plus objective ses missions et programmes d’action pour répondre aux besoins et d’utiliser à meilleur escient ses ressources pour obtenir les résultats clairement escomptés. Par exemple, elle peut décrypter les forces et faiblesses du système actuel de santé et de ses professionnels de santé, et être en position d’argumenter en faveur d’une première ligne de services de santé comme stratégie de choix pour un système plus équitable et plus efficient. En cohérence avec cette situation, sa stratégie éducationnelle consisterait à privilégier une formation de cadres compétents pour une pratique à ce niveau. Les étudiants seraient ainsi formés dans la communauté pour des périodes de durée variée suivant le stade de leur formation, pour observer et contribuer à résoudre des problèmes de santé de plus en plus complexes de la population. Le contenu du programme, le processus d’apprentissage et les résultats attendus de la formation varieront suivant le contexte socio-culturel de la population.

Le stade 3 (redevabilité sociale – social accountability) est le stade le plus élevé sur l’échelle de responsabilité sociale. Ce stade est reconnu quand l’institution entière s’engage activement dans un processus de partenariat avec les principaux acteurs de santé dans un territoire pour s’assurer du meilleur usage de ses « produits », diplômés, résultats de recherche et éventail de services pour améliorer la performance du système de santé local et le niveau de santé de la population. Ainsi, la faculté pourrait développer une stratégie suivant laquelle ses diplômés sont incités à s’installer dans des « déserts médicaux » ou autres zones défavorisées, ou à opter pour une spécialité dont le besoin est particulièrement criant. Elle pourrait également encourager des recherches dont les retombées auraient un impact direct sur la population [32]. Le stade 3 est surtout caractérisé par l’engagement à évaluer l’impact de telles interventions à l’aide de méthodes probantes de mesure (Tab. I).

L’observation empirique faite dans de nombreuses facultés de médecine à travers le monde tend à montrer que la plupart satisfont aux critères du stade 1, un petit nombre au stade 2 et un plus petit nombre au stade 3. Notons que cette estimation approximative ne tient pas compte du fait que certaines facultés n’ont pas l’expertise d’investigation ou les moyens nécessaires pour démontrer le niveau de leurs réalisations.

Les composantes 5 et 6 du tableau I illustrent les différences entre les trois stades. Ainsi, au stade 1 l’évaluation est focalisée sur le processus de fonctionnement tandis qu’une organisation efficiente de l’institution académique est reconnue quand il y a adhésion à des critères fixés par elle-même sans consultation avec l’environnement extérieur à l’institution. Dans le cas du stade 2, l’évaluation est centrée sur les résultats obtenus en accord avec les priorités de santé et reconnus par les autres acteurs de santé. Ces résultats peuvent être exprimés en termes de qualité et quantité de professionnels de santé attendus par la société, ou d’un agenda de recherche orienté sur les priorités de santé ou de services de santé centré sur les besoins globaux de la personne. Quant au stade 3, l’évaluation s’intéresse surtout à l’impact de l’institution sur le niveau de santé de la population, attesté par le fait que l’institution pratique une traçabilité de l’utilisation de ses « produits », par exemple sur la qualité de prestation de ses diplômés, l’application pratique de ses recherches, ainsi que sur l’offre équitable et efficience de ses services à des populations cibles. Une faculté de médecine au stade 3 assume une part de responsabilité des conséquences à long terme de ses actions. La spécificité du stade 3 réside aussi dans la composition de l’équipe d’évaluateurs de l’institution, puisqu’elle souhaite associer différents acteurs de santé et des représentants de la société qu’elle s’est engagée à servir. Au stade 1 et au stade 2, les évaluateurs sont exclusivement des pairs, appartenant soit à la même institution académique pour le premier, soit à d’autres institutions pour le deuxième. Dans l’encadré 1 ci-après, sont présentées des interprétations tronquées de la responsabilité sociale.

Exemples d’interprétation incomplète du concept de responsabilité sociale

L’approche globalisante du concept de responsabilité sociale peut être sous-estimée, comme en témoignent les quelques déclarations fréquemment entendues. La réponse à celles-ci figure en italique.

*La responsabilité sociale tend à réformer la mission de formation de l’institution académique.

Certes, mais pas seulement. Une faculté de médecine socialement responsable tend à adapter l’ensemble de ses missions de formation, de recherche et de prestation de service aux besoins prioritaires de santé de la société. Le changement dans ses trois missions doit être coordonné et apporter une synergie bénéfique à tous afin que l’institution ait le meilleur impact possible sur la santé de la population.

*La responsabilité sociale est synonyme de formation orientée et basée dans la communauté.

L’interaction avec la communauté est en effet essentielle pour les trois missions de l’institution. Mais, en plus d’adopter des stratégies éducatives pertinentes, la faculté socialement responsable s’engage aussi à ce que ses diplômés s’installent là où on en a le plus besoin dans le pays. Pour ce faire, elle collabore activement avec les autorités et acteurs de santé concernés pour leur utilisation appropriée (voir plus haut dans le texte la différenciation entre les trois stades de la responsabilité sociale).

*Le terme « communauté » est synonyme de désert médical, secteur rural ou défavorisé.

Par communauté, il faut entendre toute population résidant dans un environnement géographique donné, y compris urbain. Si la situation des personnes défavorisées est une préoccupation importante, le concept de responsabilité sociale inclut toute initiative tendant à mieux répondre aux besoins de l’ensemble de la société et aux défis du système national de santé pour les satisfaire, tenant compte des ressources existantes.

*La responsabilité sociale s’intéresse surtout à réduire les inégalités devant la santé.

La recherche d’équité est effectivement une des grandes priorités de la responsabilité sociale. En même temps, la recherche de qualité, de pertinence et d’efficience du système de prestation de soins l’est aussi. Ainsi, la prise en charge globale des besoins d’une personne dans son contexte de vie, l’action sur les déterminants sociaux de santé, la quête d’un système plus efficient avec un renforcement de la première ligne de santé sont autant de priorités.

*La responsabilité sociale convient surtout aux pays à faible revenu.

La responsabilité sociale est applicable à tout pays quel que soit son niveau de développement socio-économique, et à toute institution de santé du pays, au-delà de la faculté de médecine, car la quête pour plus de qualité et respect pour la personne, plus d’équité et de justice sociale, plus de pertinence dans le choix des priorités, et d’utilisation plus efficiente des ressources est universelle.

Comment mesurer la responsabilité sociale ?

Suivant le Consensus mondial, la faculté de médecine socialement responsable doit pouvoir :

  • répondre aux besoins et défis actuels et futurs de la société ;

  • prioriser en conséquence l’orientation en matière d’éducation, recherche et service ;

  • renforcer la gouvernance et le partenariat avec d’autres acteurs de santé ;

  • évaluer et accréditer en vue de mesurer et d’améliorer la performance et l’impact [1].

La faculté socialement responsable s’engage à démontrer la cohérence entre intentions, programmes d’action, résultats et impact. Par exemple, si elle s’intéresse à la disparité en santé, elle concevra une formation pour préparer ses diplômés à la combattre, elle collaborera avec les autorités locales pour créer des opportunités de travail dans ces zones, elle utilisera ses compétences en recherche pour améliorer le fonctionnement de services de première ligne et autres spécialités afin de les rendre attractifs pour les futurs diplômés, elle suggérera aux autorités compétentes de santé des mesures tendant à améliorer le niveau de santé de la population.

Le concept de responsabilité sociale repose sur une approche transparente étant donné qu’il définit explicitement les éléments suivants : santé, système de santé, partenaires de santé, gouvernance d’institution, nature des actions menées par la faculté, et tend à apporter la preuve qu’une meilleure synergie entre ces éléments a un plus grand impact sur la santé. Une faculté socialement responsable fait rapport à la société de ce qu’elle s’est engagée publiquement à faire pour la société. Ainsi, elle utilisera des marqueurs pour apprécier la façon dont elle entretient une collaboration avec les autorités sanitaires pour répondre aux besoins prioritaires de santé d’une population, elle contribue à suggérer une meilleure répartition des tâches parmi les professionnels de santé, elle expérimente des modèles d’intégration de la médecine et de la santé publique pour une plus grande efficience des services, elle participe à une répartition géographique plus équitable du personnel formé, elle s’associe à des partenaires pour une meilleure couverture sanitaire.

Ceci devrait amener à ce que la responsabilité sociale d’une faculté soit appréciée à l’avenir non seulement par des pairs, mais également par ceux qu’elle entend servir et avec qui elle devrait s’associer, à savoir des représentants des autorités sanitaires, des professions de santé et de la société civile (patients et usagers). Ce sera possible si ces représentants s’accordent sur les mêmes principes fondamentaux de responsabilité sociale. Par exemple, en Espagne, la Fundacion Educacion Medica s’est engagée à tenir une consultation de divers partenaires de santé soucieux de concrétiser les principes de responsabilité sociale, notamment des associations médicales s’interrogeant sur les fonctions nouvelles du médecin, des compagnies d’assurance soucieuses de proposer une offre de soins élargie à la population vieillissante, des firmes pharmaceutiques désireuses de s’investir davantage sur des problèmes de santé émergents [33].

Des instruments de mesure de la responsabilité sociale commencent à apparaître, tel que le modèle CPU, un acronyme pour « Conception-Production-Utilisabilité », composé d’une série de paramètres explorant successivement les engagements d’une faculté sur des priorités de santé, les actions entreprises pour honorer ces engagements, et un suivi pour s’assurer que ces engagements ont produit les effets escomptés sur la société [11].

Les encadrés 2 et 3 montrent comment le modèle CPU est structuré en vue d’atteindre des résultats concrets. L’organisation Training for Health Equity Network (THEnet) a élaboré un cadre conceptuel avec indicateurs inspiré du modèle CPU et l’a testé auprès d’un échantillon de facultés de médecine en Australie, au Canada et aux Philippines 34]. Chacune de ces facultés a estimé que ce cadre était utile pour identifier les facteurs permettant à la faculté d’agir plus positivement sur la performance du système de santé et obtenir de meilleurs résultats de santé, et en faire prendre conscience les étudiants, les cadres et les partenaires. Il a permis à chaque faculté de revisiter sa mission de responsabilité sociale, sa vision et ses objectifs, et d’identifier ses forces et ses faiblesses [23]. THEnet a soutenu ces facultés par un partage d’expériences pour atteindre leurs objectifs. Le modèle CPU a également été utilisé par certaines facultés de médecine connues pour leur interaction avec la communauté environnante pour vérifier leur impact sur celle-ci [35]. L’initiative ASPIRE a été prise par l’Association for Medical Education in Europe (AMEE) pour désigner l’excellence en éducation et en recherche des facultés de médecine, de sciences dentaires ou de sciences vétérinaires [36]. Une composante importante de cette initiative concerne la reconnaissance du niveau de responsabilité sociale des institutions en les comparant à un spectre de critères établis par un panel international d’experts en la matière. Ces critères sont accessibles sur le site d’ASPIRE: www.aspire-toexcellence.org.

Modèle Conception-Production-Utilisabilité (CPU)

CONCEPTION

1 Références

   1.1 Valeurs : Référence explicite à un corps de valeurs (c’est-à-dire qualité, équité, pertinence, efficience)

   1.2 Population : Référence aux caractéristiques de la population et à ses besoins prioritaires de santé

   1.3 Système de santé : Référence à l’évolution du système de santé vers plus de cohérence et d’intégration

   1.4 Personnels de santé : Référence aux besoins quantitatifs et qualitatifs. Voir items 1.1, 1.2, 1.3

2 Engagements

   2.1 Mandat : Mission et objectifs institutionnels conformes aux références

   2.2 Terrain : Participation à la gestion de santé d’un territoire et d’une population définie

   2.3 Partenariat : Collaboration suivie avec principaux acteurs de la santé, sur le terrain et au plan national

   2.4 Produit fini : Définition/ justification du profil du personnel à former (liste de compétences). Voir Références

3 Gouvernance

   3.1 Plan stratégique : Ordonnancement des engagements selon un plan largement agréé

   3.2 Gestion : Mécanismes de valorisation, coordination et évaluation pour la mise en œuvre du plan

   3.3 Ressources : Mobilisation de ressources intérieures et extérieures à la hauteur des engagements

PRODUCTION

4 Terrain d’application : Formation, recherche et service sur le terrain. Voir item engagement 2.2

5 Programme de formation

   5.1 Objectifs et contenus : Conformes au profil du personnel à former (2.4)

   5.2 Déroulement : Exposition précoce, longitudinale et intégrée aux réalités de terrain

   5.3 Apprentissage : Participation à la résolution de problèmes de santé complexes, individuels et collectifs

   5.4 Stages : Lieux privilégiant les services de santé de première ligne et leur rapport avec d’autres niveaux

6 Étudiants

   6.1 Recrutement : Egalité des chances et priorité aux étudiants issus de communautés défavorisées

   6.2 Carrière : Orientation et accompagnement pour satisfaire des besoins de santé prioritaires

   6.3 Évaluation : Exploration de l’ensemble des compétences

7 Enseignants

   7.1 Source : Participation d’une variété d’enseignants issus des services sanitaires et sociaux

   7.2 Compétences : Enseignants aptes à servir de modèles, en rapport avec le profil à former (item 2.4)

   7.3 Soutien : Formation et autres incitatifs pour améliorer santé publique et éducation médicale

8 Recherche : En gestion du système de santé. Voir Références (Sect. 1) et Utilisabilité (Sects. 10 et 11)

9 Service : Excellence dans les soins de santé primaires. Voir Utilisabilité (Sects. 10 et 11)

UTILISABILITE

10 Emploi

   10.1 Débouchés : Plaidoyer et collaborations en faveur de professions en besoins prioritaires

   10.2 Implantation : Rétention et répartition géographique des diplômés selon besoins. Voir items 1.1 et 1.2

   10.3 Prestations : Maintien de compétences des diplômés, en rapport avec le profil. Voir item 2.4

   10.4 Pratique : Amélioration des conditions de pratique au niveau de la première ligne. Voir sections 4, 9 et 10

11 Impact

   11.1 Partenariat : Qualité de la relation entre acteurs pour un meilleur fonctionnement du système de santé

   11.2 Effets sur la santé : Diminution de risques et promotion de santé sur le terrain. Voir 2.2 et 2.3 et section 4

   11.3 Promotion : Diffusion de résultats sur l’utilisabilité auprès des organes décisionnels de la région ou nation

Exemples illustrant le modèle Conception-Production-Utilisabilité (CPU)

*Exemple appliqué à une faculté démontrant son engagement en faveur de l’équité en santé :

C : la faculté est avertie de la disparité de l’accès à la santé dans la région et tend à meilleure répartition géographique de ses diplômés, capables de s’adapter aux conditions de vie locale.

P : la faculté recrute un pourcentage d’étudiants proportionnel à la population en situation défavorisée et expose l’ensemble des étudiants à une expérience des problèmes de cette population, tout au long de leur formation.

U : la faculté incite les employeurs potentiels de leurs gradués pour une ouverture de postes nouveaux et attractifs et travaillent de concert avec eux pour leur installation dans ces régions défavorisées.

*Exemple appliqué à une faculté démontrant son engagement en faveur de la qualité des soins :

C : La faculté signe un contrat de collaboration avec les autorités sanitaires et les praticiens pour une prise en charge des malades diabétiques, en tenant compte des déterminants sociaux.

P : La faculté participe à la mise en place dans un territoire de modèles intégrés de soins de première ligne pour une approche des besoins globaux des personnes diabétiques.

U : La faculté participe à l’émergence d’une politique incitative auprès des autorités sanitaires pour une prise en charge innovante des personnes diabétiques au niveau de la première ligne de soins, ainsi qu’une étude d’impact à long terme.

Un certain nombre de retombées positives existent, qui sont autant d’arguments additionnels incitant une faculté de médecine à considérer l’approche de responsabilité sociale comme un guide essentiel à son développement, et qui pourraient être considérées aussi parmi les critères d’évaluation, notamment :

  • un usage plus judicieux des ressources disponibles, sachant les coûts croissants et la grande demande des soins de santé ;

  • un recentrage de la recherche académique pour un plus grand impact sur la santé des citoyens par une meilleure performance du système de santé, et une approche coordonnée des soins individuels et de la santé publique ;

  • la nécessité de prioriser et anticiper l’effet des actions en vue d’un plus grand impact sur la santé, qui est un axe important de la responsabilité sociale : la démonstration par la preuve ;

  • l’intérêt à imaginer des rôles nouveaux et une meilleure répartition des tâches parmi les professionnels de santé, étant donné l’évolution démographique et la forte demande des usagers ;

  • le besoin d’une plus grande transparence dans les réalisations des institutions, exigées tant par les autorités que le public ;

  • l’exigence de tout système de santé de faire évoluer constamment son corpus idéologique et ses approches et de tendre vers davantage d’objectivité et de mesure d’impact.

Une faculté de médecine socialement responsable se doit de contribuer à répondre à toutes ces attentes en concertation avec les autres institutions concernées dans la société.

Conseils pratiques pour devenir une faculté socialement responsable

Les précédentes sections de ce guide ont étudié le concept et les différents gradients de la responsabilité sociale et leur application à des institutions de formation des professionnels de santé. Dans la partie qui suit nous allons considérer quelques modalités pratiques permettant à la faculté de s’engager résolument dans ce mouvement et d’aligner ses activités pour être reconnue socialement responsable. D’abord, quelques idées seront proposées pour aider la faculté à se situer sur l’échelle de responsabilité sociale, notamment par quelques scénarios pour vérifier la disposition au changement. Ensuite, seront évoqués des modèles de changement, des suggestions pour créer une coalition de pionniers et une stratégie du changement ainsi que des résultats obtenus rapidement par les premiers novateurs. On notera l’implication dans ces processus de représentants de la communauté, du public, des patients et des étudiants. Enfin, nous envisagerons le cas de facultés réfléchissant aux changements qui pourraient être planifiés, en ajoutant cependant la mise en garde de ne pas réfléchir trop longtemps sur l’opportunité de devenir socialement responsable car le monde évolue rapidement et elle pourrait se trouver devant de nouveaux défis à surmonter.

Positionnement comparatif et auto-évaluation

Chaque faculté peut se prévaloir du fait qu’elle s’efforce de répondre aux besoins de la société. Comme il n’existe pas de stratégie universelle pour être socialement responsable qui soit applicable à chaque cas, différent scénarios peuvent être imaginés, qui pourraient convenir à différentes situations et apporter des solutions.

Scénario no 1 : Faculté n’ayant pas pris conscience de la problématique

C’est le cas de la « tour d’ivoire » où la faculté n’est pas consciente de l’écart qui la sépare des besoins prioritaires de santé de la société. Par contre, elle excelle dans la recherche menée au sein de ses départements et est confiante quant à la qualité et la pertinence de ses prestations, n’étant pas expressément organisée pour que l’ensemble de l’institution réponde aux besoins sociétaux. Cependant, l’un ou l’autre cadre de la faculté peut faire un plaidoyer en faveur de la responsabilité sociale, insistant sur son importance pour l’institution. Par contre, des membres influents peuvent être réticents, privilégiant une reconnaissance de leurs actions au niveau mondial plutôt que régional ou local. Souvent, l’excellence est synonyme de réalisation d’une recherche sophistiquée alors que les pionniers du changement arguent que l’excellence se mesure à l’aune de la capacité à induire une amélioration de la santé pour toute société, au niveau mondial, régional ou local.

Scénario no 2 : La faculté est disposée à… si seulement…

La plupart des cadres sont conscients de la responsabilité de leur faculté par rapport à la société et expriment leur souhait de réorienter les missions et les programmes pour une plus congruence avec les besoins de la société. Quelques départements conduisent des actions remarquables dans la communauté environnante et la faculté voudrait étendre de telles actions à tous les départements, sans pourtant y parvenir par manque de moyens à leur disposition ou de soutien extérieur ainsi qu’en raison du peu d’engouement de la part d’autres acteurs de santé. Son élan dépend d’une volonté politique et d’un financement venant de son autorité de tutelle, par ailleurs sollicitée pour d’autres priorités. Une promotion nationale de la responsabilité sociale en direction des institutions académiques et des instances du monde de la santé est attendue.

Scénario no 3 : La faculté est consciente et engagée, mais…

Dans ce cas, la faculté est consciente des actions prioritaires de santé à mener et interagit avec des instances au sein de la société. Ses programmes forment des diplômés possédant les compétences nécessaires, sa recherche ne néglige pas l’investigation sur les déterminants de santé et une bonne partie de sa prestation de service se fait dans un réseau de centres de santé de proximité. Néanmoins, la faculté sait que par elle-même, son impact (du moins la preuve de son impact) reste limité pour influencer la pratique de ses diplômés, la dynamisation du système de santé, voire les indicateurs de santé. Le leadership de la faculté est déterminé à créer un partenariat durable avec les principaux acteurs de santé afin d’optimiser les contributions respectives pour un système de soins plus juste, efficient et de qualité. Ceci est confirmé par les mots d’un Doyen : « Au bout du compte, les effets de notre effort de transformation ne seront démontrés que lorsque les patients et les populations bénéficieront d’un meilleur état de santé ». La faculté peut éprouver un besoin d’expertise et de compétence pour s’engager dans cette recherche complexe qui consiste à apporter la preuve de l’impact sur l’état de santé.

Scénario no 4 : La faculté est consciente, bien disposée et en bonne voie…

Dans de rares cas, la faculté serait reconnue comme pionnière et militante dans le champ de la responsabilité sociale – reconnue par ses pairs et par des observateurs extérieurs. Elle aura alors une vision et une stratégie conçue et partagée avec les autres acteurs de santé dans la communauté, elle aura bien sûr des programmes et projets conformes à cette stratégie et sera en mesure de démontrer les améliorations apportées au système de santé et à l’état de santé des populations qu’elle entend servir. Comme toute équipe ou faculté engagée, elle ne se reposera pas sur ses lauriers, mais continuera à entretenir une forte coalition pour aller toujours plus loin dans sa quête de service pour autrui.

Changer de culture, changer l’état d’esprit : conduire le changement

Dans les scénarios 1 et 2, il y a le désir du changement et de mutation vers une faculté plus socialement responsable, mais un leadership compétent et stratégique est nécessaire. Celui-ci évaluera la faculté par rapport à des étalons disponibles dans des cadres conceptuels de responsabilité sociale établis par ailleurs, tels que ceux utilisés par THEnet ou ASPIRE [37]. Ensuite, une stratégie de changement sera mise en place pour satisfaire aux interrogations suivantes : quelles sont les actions déjà menées par la faculté et pertinentes par rapport aux principes de responsabilité sociale ? Quelles améliorations sont envisagées ? Comment ces améliorations bénéficieront-elles aux autres acteurs de santé ? Comment celles-ci vont-elles attirer de nouveaux soutiens et financements ? (par exemple : un partenariat avec d’autres acteurs de santé pour réduire la disparité dans un territoire ; une expérimentation d’un centre multi-professionnel de soins de santé de première ligne intégrant les soins individuels et des actions à caractère populationnel ; un agenda de recherche dont les priorités seraient inspirées des besoins des patients et de la communauté ; une prise de conscience de l’empreinte carbone et l’effet sur l’environnement de certaines pratiques).

De plus, le leader ou l’agent de changement opérant dans la faculté pourrait organiser au sein de l’institution un événement autour de la responsabilité en invitant les principaux acteurs de santé pour entendre l’expérience d’autres facultés s’étant distinguées dans cette approche et en apprendre les avantages. Trois stratégies peuvent être utilisées par ceux et celles qui souhaitent promouvoir les principes de responsabilité sociale. D’abord, la déclaration d’excellence pour une faculté œuvrant pour et avec les représentants de la société, par exemple, en publiant un entrefilet dans la presse, en remettant un prix, en impliquant le public ou des patients dans un projet de recherche (souvent estimée par des donateurs), en affichant la congruence avec la politique nationale en matière d’éducation (pour débloquer des fonds). Ensuite, l’affirmation d’une vision commune des acteurs de santé avec le constant souci de comprendre les spécificités et de faire converger les engagements. Rappelons que l’excellence de l’institution tient à ce que la responsabilité sociale soit considérée par tous comme le socle de sa mission. Enfin, un plaidoyer au niveau national et international car un succès durable dans notre propre faculté dépendra aussi d’une large reconnaissance du bien-fondé de la responsabilité sociale. Contribuons à créer ce large mouvement en faveur de la justice sociale et la transformation de nos sociétés.

Gérer le changement : processus, actions, curriculum et contributions

Dès que la faculté est résolument engagée dans un processus de changement, c’est le moment de trouver des soutiens, d’énoncer des objectifs clairs, de reconnaître les avancées et d’éviter l’auto-satisfaction. Bien que des innovations dans le curriculum soient assez faciles à entreprendre, elles peuvent constituer une bonne base de départ pour stimuler des changements plus profonds de l’institution. Ainsi, des projets novateurs dans la communauté dans lesquels participent les étudiants, des cadres de la faculté et des professionnels de santé du terrain ont vocation à éveiller l’attention, ainsi que la présence à la faculté de représentants de la société lors d’une discussion et évaluation de ces projets. La faculté capitalisera sur ces innovations, d’autant mieux que la mission de la faculté et sa stratégie de développement sont explicitement fondées pour répondre aux besoins prioritaires de santé de la société. S’il advenait un ralentissement dans le processus de changement, il conviendrait de réfléchir à ses causes, y compris aux rapports que la faculté entretient avec les acteurs de santé dans la communauté, éventuellement en organisant un séminaire d’analyse et de propositions en présence des personnes et instances concernées. Un changement institutionnel réussi suppose une transparence sur les forces et faiblesses, sur les opportunités et contraintes de chaque partie en présence, en vue de décisions unanimes pour avancer.

Freins et résistance au changement

Transformer une faculté de médecine pour la rendre socialement responsable n’est pas une sinécure, en particulier quand il s’agit d’amender la philosophie de la faculté, son organisation interne. Les facultés doivent prendre toute la mesure de la résistance qu’elles vont rencontrer pour appliquer ce paradigme puisque le concept de responsabilité sociale peut être perçu comme une menace à l’autonomie et aux prérogatives établies et donc entraîner une attitude négative, voire un blocage de certains. De même, les médecins praticiens en donnant des soins ne reconnaissent pas nécessairement le soubassement social du mal-être de leurs patients et sont réticents à déléguer certaines de leurs taches à d’autres professionnels de santé. Quant à la plupart des chercheurs, ils ne sont guère motivés à traiter le côté populationnel des problèmes de santé, considérant qu’une telle recherche est souvent estimée de moindre importance, trouve difficilement une revue pour être publiée, obtient rarement des fonds et est moindrement prise en compte par les pairs pour une promotion de carrière. Souvent, les membres de la faculté estiment que toute recherche relative à la responsabilité sociale est du « soft », ne relève pas d’une véritable science bio-médicale, quelquefois découragent même les étudiants à prendre le concept au sérieux. En travaillant dans l’espace « responsabilité sociale », on sort de sa zone de confort et de contrôle pour rentrer dans un cercle où on a à apprendre des autres et à partager des réalisations avec d’autres. Les facultés devront faire face à des ambiguïtés. Par exemple, pour une faculté, le fait de s’ouvrir sur la société et de faciliter l’admission d’étudiants issus de populations défavorisées peut entrer en contradiction avec la notion d’excellence académique telle qu’elle est perçue au niveau national et l’allocation d’incitatifs financiers qui s’y rapportent. Une première réplique pour réduire ces embûches est de les reconnaître et d’organiser un débat ouvert et honnête avec toutes les parties prenantes, conduit par l’instance décisionnelle de l’institution. La résistance au changement peut être atténuée si les plus conservateurs de la faculté réalisent qu’un mouvement mondial en faveur de plus de responsabilité sociale est soutenu par les gouvernements, les contribuables et la société civile, de même qu’une plus grande transparence, une meilleure gouvernance des institutions et un usage plus efficient des ressources.

Comment relever les nombreux défis ?

Un certain nombre de défis sont à relever pour progresser sur l’échelle d’obligation sociale et arriver à une pleine responsabilité sociale (voir le stade 3 évoqué plus haut). Le tableau III présente quelques défis à partir d’exemples de par le monde et quelques solutions.

Tableau III

Défis et solutions.

Défis de l’avenir

Le document issu du Consensus mondial sur la responsabilité Sociale [1] invite les facultés à anticiper et à répondre aux besoins prioritaires de santé de la société, identifiés au niveau local et régional, voire mondial. Parmi les priorités au niveau mondial, citons la menace de dégradation de l’environnement, y compris les conséquences dramatiques du réchauffement climatique. Comment le concept de responsabilité sociale peut-il répondre à ces défis ?

Nous suggérons que les facultés militant pour la protection de l’environnement soient reconnues comme des modèles de responsabilité sociale. D’abord, une faculté répondant aux critères du stade 1 de responsabilité sociale (responsabilité sociale – social responsibility) devrait faire prendre conscience de l’importance de la qualité de l’environnement sur la santé. Comment cette implication pour la protection de l’environnement se manifeste-t-elle ? Comment la mesurer ? Comment s’assurer que les diplômés seront avertis de l’impact de l’environnement sur la santé ? Par exemple, en calculant l’empreinte carbone de la faculté du fait de ses différentes activités et en prenant conscience que chacun à titre personnel, enseignant comme étudiant, peut avoir un impact sur l’environnement par un usage abusif d’eau ou autre ressource.

Ensuite, pour le stade 2 de la responsabilité sociale (adaptabilité sociale – social responsiveness), la faculté démontre comment réduire l’impact sur l’environnement local et général, sur le climat et l’utilisation des ressources. Par exemple, elle propose une politique et des priorités pour réduire le gaspillage d’eau et de matières premières, pour isoler des bâtiments, modérer les déplacements, recycler et soutenir toute initiative pour le développement durable.

Enfin, pour le stade 3 de la responsabilité sociale (redevabilité sociale – social accountability), une faculté respectueuse de l’environnement entretient des liens étroits avec la communauté locale avec un plan d’action clairement établi pour réduire l’impact négatif sur l’environnement. Elle adapte ses programmes de formation, de recherche et de prestation de services en vue d’un engagement pour préserver le cadre de vie des générations futures. L’effet de son action pourra être mesuré en termes de plaidoyer politique, de promotion pour des services de proximité, de réduction du gaspillage de matériaux utilisés pour fins de diagnostic et de soins, et de mise à disposition de la société de gradués possédant les compétences pertinentes quant à la protection de l’environnement. Dans le même esprit, pourra-t-elle promouvoir un système de santé plus efficient, privilégiant la prévention, réduisant le gaspillage et les procédures inutiles, recommandant des technologies à faible empreinte carbonée, favorisant l’autonomie du patient dans la protection de sa santé [37].

Exemples de facultés de médecine socialement responsables

Cette section décrit trois facultés de médecine socialement responsables dans le domaine de la formation, de la recherche et de la prestation de services.

Responsabilité sociale et formation : Hull York Medical School (HYMS), Royaume Uni

Formation initiale

La faculté de Hull York est située dans le Yorkshire et la région Humber dans l’Est de la Grande Bretagne, a été créée en 2003 pour améliorer l’accès aux soins de santé dans une région déshéritée. Elle a été honorée en 2013 du prix ASPIRE pour la responsabilité sociale en reconnaissance de ses réalisations pour instaurer un service de soins de santé primaire et communautaire. Dès sa création, la HYMS met en place un curriculum comprenant un apprentissage précoce dans la communauté afin que les étudiants prennent rapidement et durablement conscience du contexte de vie et utilise à bon escient les apports des sciences bio-médicales et humaines. La plupart des tuteurs et enseignants impliqués dans les dispositifs de type apprentissage par problèmes, en apprentissage clinique et en communication sont issus de la première ligne de santé (souvent des médecins généralistes), de même que pour des postes de responsabilité, tels que doyen et vice-doyens. Pour la suite de leur formation, les étudiants ont des stages intégrés de soins de santé primaire et secondaire et passent 35 % de leur temps sur le terrain au plus près de la population.

Le choix de carrière des diplômés de la HYMS va en priorité vers la médecine générale : 45 % pour le premier choix et 65 % pour l’autre choix, ce qui peut être comparé aux moyennes des autres facultés de médecine du pays, moins inclines à privilégier les soins de santé de première ligne au sein de la communauté (30 et 49 % respectivement) [38]. Enfin, 21 % des diplômés du pays entrent en spécialité de médecine générale alors que ce taux atteint 29 % pour les diplômés de HYMS, un peu plus près de la cible des 50 % fixée par le gouvernement [39]. Bien que la relation cause à effet ne soit pas établie, on peut néanmoins supposer que la formation au plus près du terrain a eu une influence [40].

Formation continue et prestation de service dans la région

La HYMS s’est investie dans la formation continue de ses tuteurs dans les hôpitaux et la centaine de centres de santé. Cette formation va d’un apprentissage à l’encadrement (obligatoire pour les chefs de service) jusqu’à l’obtention d’un certificat d’aptitude en éducation aux soins de santé primaires (délivré à plus d’une centaine de tuteurs cliniques au niveau périphérique). Cette activité a contribué à améliorer les compétences pédagogiques des tuteurs et à crédibiliser la démarche auprès de potentiels maîtres de stages cliniciens. Un temps de formation a été formellement réservé pour les médecins généralistes et infirmières en concertation avec les agences régionales de santé. Un tiers des professionnels de santé de la région, soit 1500, ont bénéficié d’une formation, sans le concours financier de firmes pharmaceutiques et sous l’égide de personnalités de renom en formation à la médecine générale.

Responsabilité sociale et recherche : Memorial University de Terre Neuve, Canada

La recherche conduite par des facultés de médecine socialement responsables est inspirée par et répond aux besoins prioritaires de santé de la région. La recherche couvre un large spectre : de la recherche bio-médicale à la recherche clinique et à la recherche à caractère populationnel.

La faculté entretient un rapport étroit avec la communauté quant à la définition d’un agenda de recherche, une participation aux travaux de recherche et l’application concrète des résultats. Une priorité de recherche est accordée au regard des effets bénéfiques qu’elle aura sur la santé de la population locale et régionale [36]. Par exemple, la région de Terre Neuve et du Labrador est une province étendue sur un grand espace (400 000 km2) pour une population d’à peine 500 000 habitants. La population est essentiellement constituée de descendants des premiers immigrants dont certains groupes sont affligés de maladie héréditaire et à laquelle la faculté de médecine de Memorial University de Terre Neuve a dédié une recherche génétique importante. Cette recherche est pertinente pour la population de la province, mais également pour le reste du monde car cette maladie n’est pas confinée à Terre Neuve et au Labrador. Une de ces maladies est la cardiomyopathie ventriculaire arythmogène. Celle-ci peut provoquer la mort subite de personnes jeunes par fibrillation ventriculaire. L’implantation d’un pacemaker défibrillateur dans les membres de familles à risque a arrêté l’incidence de mort subite. L’énigme génétique a pu être résolue et un test génétique mis au point pour détecter les membres des familles à risque nécessitant en priorité l’implantation d’un défibrillateur [41]. Ce modèle de recherche clinique a été développé au regard des principales maladies de la population. Des équipes multi-disciplinaires intégrées, quelquefois avec des experts en médecine moléculaire, l’utilisent auprès des patients, de la famille et de la population, avec des implications de nature éthique, légale ou d’organisation sanitaire.

Une approche similaire a été utilisée dans une recherche sur l’amélioration de l’efficacité et l’efficience du système de santé en Terre Neuve et Labrador. Depuis 2008, à l’initiative du système provincial de santé, le Contextualized Health Research Synthesis Program (CHRSP) a lancé 21 projets menés par une équipe comprenant le vice-ministre de la santé, le vice-ministre des personnes âgées, du bien-être et du développement social, ainsi que les directeurs des quatre agences régionales de santé. Ce groupe de six leaders a mobilisé les responsables administratifs et cliniciens afin d’élaborer annuellement une liste de sujets de recherche. Pour chaque sujet, le CHRSP désigne une équipe de recherche multi-disciplinaire comprenant un expert du sujet, des chercheurs universitaires, et des utilisateurs potentiels des résultats de la recherche, à savoir, des politiques, des cliniciens, des représentants de patients et de la société civile. L’équipe retient le meilleur des connaissances sur le sujet et l’applique pour utilisation éventuelle à Terre Neuve et au Labrador. Etant le fruit d’une véritable collaboration entre producteurs et bénéficiaires des connaissances, le travail des CHRSP – incluant la rédaction des protocoles de recherche, l’interprétation des données et la diffusion des résultats – jouit d’un crédit considérable dans l’élaboration de politiques de santé en Terre Neuve et Labrador.

Responsabilité sociale et service de santé : Faculté de Médecine du Nord de l’Ontario, Canada

La Faculté de médecine du Nord de l’Ontario (FMNO) est la plus jeune faculté de médecine du Canada. Créée en 2002 avec un mandat explicite de responsabilité sociale, elle sert une population de 800 000 habitants répartis sur une superficie de 800 000 km2, selon un modèle de formation médicale basée sur les besoins de la communauté [42]. Les indicateurs de santé du Nord de l’Ontario sont inférieurs à ceux de la province, en particulier pour les 40 % de la population vivant en milieu rural et en région éloignée, ainsi que pour les minorités de population indigène et francophone. La FMNO a impliqué la communauté dans l’élaboration et l’organisation des programmes de formation avec un contenu privilégiant les priorités de santé de la population ainsi qu’une présence sur le terrain, notamment dans des zones déshéritées, en cohérence avec cette approche. La formation intégrée au sein de la communauté se fait tout au long de la formation médicale avec un encadrement de qualité dans des centres des soins de santé primaires, en vue de préparer les futurs diplômés à pratiquer dans de tels endroits défavorisés [43]. Un aspect important de la formation est l’évaluation continue des activités afin d’assurer leur congruence avec le mandat de responsabilité sociale de la FMNO. Cette pratique a conduit, par exemple, à l’inclusion d’un cours d’anthropologie et de santé publique pendant toute la quatrième année, avec des études de cas inspirés des déterminants sociaux de la santé dans le Nord de l’Ontario, et l’admission préférentielle aux études médicales d’étudiants issus de la population, indigène, rurale et francophone [44]. La FMNO a eu un impact significatif sur l’accès aux soins dans la région. La grande majorité des diplômés (67 %) ont opté pour une formation en médecine de famille et 30 % choisissent d’autres spécialités médicales dont la région est en manque [42]. Plus de 70 % des spécialistes formés à la FMNO s’installent dans la région et jusqu’à 90 % si l’on compte l’ensemble des diplômés de la FMNO.

Le développement d’une stratégie de formation médicale orientée sur et implantée dans la communauté exige un accord de partenariat avec des hôpitaux, diverses structures de soins de santé et des agences du gouvernement pour une organisation efficace d’un canal de vidéo-conférences à travers lesquelles une formation à distance est possible ainsi que d’un service de télémédecine. Les étudiants de la FMNO ont été formés à utiliser la télémédecine. De plus, une recherche conduite par des cadres de la FMNO a montré que la qualité des soins délivrés à distance était équivalente à ceux donnés en présence du malade [45]. L’investissement consenti pour la création de la FMNO, combiné à l’originalité de son programme de formation, a contribué à multiplier l’usage de la télémédecine dans la région, à améliorer l’accès aux soins et à considérablement réduit le déplacement des patients et des professionnels de santé, sans compter l’impact positif sur l’environnement [46].

Conclusions

Décider de rendre une faculté de médecine socialement responsable revient à la transformer en agent de changement du système de santé. Cela suppose une collaboration avec tous les acteurs du système de santé, y compris avec les anciens diplômés ou d’autres professionnels de santé formés ailleurs. Cela suppose une relation étroite avec les représentants de la population où la faculté est implantée, une communication effective et un respect mutuel. L’émergence de projets axés sur des besoins prioritaires de santé de la population, induite par quelques pionniers, peut bénéficier des feux de la rampe, mais il faut retenir que de telles avancées peuvent rester isolées et sans lendemain, en l’absence d’une ferme détermination de la faculté, à tous les niveaux, à honorer son engagement en faveur de la responsabilité sociale, sur le plan stratégique, financier et administratif. La réalisation durable de la responsabilité sociale nécessite aussi un soutien explicite des autorités nationales, politiques et académiques, y compris des organes de régulation et d’accréditation. Cette entreprise qui semble herculéenne est tout à fait réalisable, même pour une faculté dite traditionnelle, pour autant que parmi les changements proposés chacun puisse trouver une opportunité d’épanouissement.

Approbation éthique

Non sollicitée car sans objet.

Liens d’intérêt

Aucun des auteurs ne déclare de conflit d’intérêt en lien avec le contenu de cet article. Les auteurs sont seuls responsables pour le contenu et la rédaction de cet article.

Notes sur les auteurs

Charles Boelen est un consultant international en systèmes et personnels de santé, et un ancien coordonnateur du programme de l’OMS des ressources humaines pour la santé. Durant ses 30 années de carrière à l’OMS, il collabora avec des institutions gouvernementales et académiques dans de nombreux pays sur des projets relatifs au développement des professionnels de santé, et contribua à l’élaboration de politiques et stratégies internationales dans ce domaine. Il co-préside le groupe du Consensus mondial sur la responsabilité sociale (GCSA).

David Pearson est un médecin de famille établi dans le Yorkshire, Angleterre. Il dirige l’ Academy of Primary Care à Hull York Medical School (HYMS). En temps que vice-doyen pour la formation, il a rédigé la candidature de sa faculté pour l’obtention du prix ASPIRE pour la responsabilité sociale. Par la suite, il a été impliqué au renforcement de l’engagement de la faculté pour la responsabilité sociale et contribue au travail du panel AMEE ASPIRE-to-Excellence Social Accountability.

Arthur Kaufman est professeur émérite en médecine de famille et communautaire et vice-chancellier pour la santé de la communauté à l’Université du Nouveau Mexique, USA. Il est pionnier de la formation médicale basée dans la communauté et dans les services de santé aux populations marginales. Il contribua à développer des modèles intégrés de formation et de service tenant compte des déterminants sociaux dont les effets sont mesurés par un impact sur la santé des communautés.

James Rourke est professeur de médecine de famille et doyen de la faculté de médecine à Memorial University à Terre Neuve, Canada. Il s’est fortement impliqué à concrétiser la responsabilité sociale au niveau local, national et international, y compris dans les projets « Le futur de la formation médicale au Canada » et comme président du panel AMEE ASPIRE-to-Excellence Social Accountability.

Robert Woollard est professeur de médecine de famille à l’université de Colombie Britannique, Vancouver, Canada. Il a une grande expérience au niveau national et international dans les domaines de l’éducation médicale, les éco-systèmes de santé et le développement communautaire. Il est fortement engagé sur la responsabilité sociale des facultés de médecine et travaille au Népal, en Afrique et en Indonésie sur des projets de responsabilité sociale, de soins de santé primaires et de systèmes d’accréditation. Il co-préside le groupe du Consensus mondial sur la responsabilité sociale (GCSA).

David C. Marsh est professeur de sciences cliniques et doyen associé pour l’engagement communautaire à la Faculté de médecine du Nord de l’Ontario, au Canada. Son travail clinique et de recherche est centré sur l’addictologie avec un intérêt particulier pour la réduction de la souffrance, une politique publique basée sur des preuves et des interventions innovantes pour la prévention et le traitement de la dépendance aux opioïdes dans des populations marginalisées. Son expertise en éducation médicale et recherche est dans le champ de la responsabilité sociale et l’interaction avec l’appropriation par la communauté indigène, rurale et la minorité linguistique.

Trevor Gibbs est chargé du développement de l’Association for Medical Education in Europe (AMEE) et secrétaire du comité éditorial des guides Best evidence in medical education (BEME). Comme consultant de l’OMS en éducation médicale, en santé des adolescents et en soins de santé primaires, il a une expérience internationale extrêmement développée en éducation médicale. Il est membre exécutif du groupe GCSA.

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Citation de l’article : Boelen C., Pearson D., Kaufman A., Rourke J., Woollard R., Marsh D.C., Gibbs T. Rendre une faculté de médecine socialement responsable. Guide AMEE no 109. Pédagogie Médicale 2018:19;181-198

Liste des tableaux

Tableau I

Echelle de responsabilité sociale.

Tableau II

Les 10 axes stratégiques du Consensus mondial pour la responsabilité sociale des facultés de médecine [1].

Tableau III

Défis et solutions.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Les fondements de la responsabilité sociale des facultés de médecine (d’après Rourke [14]).

Dans le texte

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