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Numéro
Pédagogie Médicale
Volume 21, Numéro 4, 2020
Page(s) 241 - 243
Section Communication brève
DOI https://doi.org/10.1051/pmed/2020058
Publié en ligne 23 décembre 2020

Contexte

La Faculté de médecine de Tunis (FMT) compte 2500 étudiants répartis dans le premier cycle des études médicales (PCEM 1 et 2) et le deuxième cycle des études médicales (DCEM 1, 2 et 3). Ses enseignants hospitalo-universitaires sont répartis en 49 sections représentant les différentes spécialités médicales, chacune d’entre elles étant gérée par un responsable, le coordinateur de section.

Pendant sa formation générale et ce depuis les années 1980, l’apprenant procède à une étude préalable et autonome d’un mini-module d’auto-enseignement (MAE), remis dès le début de l’année universitaire. Cette étude est suivie d’une séance en présence, selon le format « clarification, illustration, application et participation » (CIAP) avec l’enseignant à la faculté [1] et d’un stage hospitalier. Depuis 2018, dans une démarche innovante de modernisation de l’enseignement, plusieurs enseignants de la faculté ont bénéficié de formations en pédagogie numérique. Ces formations, complétées par la rédaction d’une charte graphique des cours en ligne, avaient pour objectif de favoriser l’élaboration et la mise en ligne de ressources complémentaires au MAE et à la séance en présence. Ces ressources ont été médiatisées via une plateforme Moodle, mise à la disposition des différentes universités tunisiennes par l’Université virtuelle de Tunis (UVT).

Problématique

Suite à la pandémie mondiale du COVID-19, une réflexion a été entamée et un challenge a été relevé afin de poursuivre l’enseignement des PCEM et des DCEM malgré la décision de suspendre les cours en présence, prise le 13 mars 2020. Un projet « enseignement en ligne solidaire covid+ FMT (ELSOLC+FMT) » a été développé pour garantir la continuité pédagogique en mobilisant ses enseignants et en soutenant ses étudiants. Dans une démarche solidaire, les différents intervenants se sont investis afin d’enrichir la plateforme d’enseignement en ligne et de faciliter l’accès aux étudiants.

L’objectif de cette étude est de décrire les mesures prises par les différents intervenants pour préserver la continuité pédagogique aux PCEM et DCEM durant la pandémie du COVID-19.

Ce qui a été fait

Les coordinateurs de section ou leurs représentants ont bénéficié d’ateliers de formation à l’enseignement en ligne. Au cours de ces formations, la plateforme Moodle a été structurée conformément au programme des études des PCEM et DCEM. Des comptes d’accès et des espaces de cours ont été créés à la faveur des enseignants.

Dans le but d’harmoniser la construction des espaces de cours, une charte graphique a été mise en place [2] et un scénario pédagogique a été établi [3]. Ce document comportait une description du contenu d’un cours en ligne (Fig. 1) et comportait aussi les modalités de paramétrage de l’inscription des étudiants, les modalités d’élaboration et de validation des supports de cours pour les enseignants.

Afin d’évaluer les besoins des apprenants du PCEM et du DCEM, une enquête anonyme a été menée, 576 réponses ont été recueillies permettant d’identifier les ressources nécessaires : (1) les documents de référence : des capsules vidéos (89 %), des images (58 %), des enregistrements audio (41 %), des articles médicaux (34 %) ; (2) les évaluations formatives : des cas cliniques (82 %), des questions à choix multiples(QCM) d’auto-évaluation (80 %), des sessions d’examen corrigées (59 %) ; (3) les moyens de communication utiles : un forum de communication (59 %).

Tous les enseignants ont été sensibilisés à respecter la charte. La charte, les guides d’accès à la plateforme et la liste des cours en ligne ont été intégrés au site de la faculté (http://www.fmt.rnu.tn/index.php?id=575).

Enfin, la communication avec les enseignants a été optimisée par les appels téléphoniques, l’envoi d’email aux responsables de l’enseignement en ligne.

Concernant les apprenants, une équipe de facilitateurs (l’équipe ELSOLC+FMT) a été constituée. Elle est composée d’étudiants de DCEM3 et de l’association Associamed. L’équipe a veillé à médiatiser la plateforme d’enseignement en ligne auprès des apprenants et à les assister pendant leur confinement [2]. L’équipe a également mis en place une foire aux questions concernant la plateforme et a participé à la mise à jour de la liste des cours en ligne pour les apprenants, qui est disponible sur le site de la faculté.

Les apprenants ont communiqué avec l’équipe ELSOLC+FMT via les réseaux sociaux et avec les enseignants via les emails et le forum de communication.

Un émail a été adressé par le décanat à tous les étudiants, pour identifier ceux qui avaient besoin d’un soutien financier. Puis une procédure d’octroi de tablettes et de clés 4G a été entamée, dans le respect de la dignité des étudiants nécessiteux.

thumbnail Fig. 1

Contenu d’un cours en ligne.

Ce que nous avons observé

L’objectif de mettre en ligne les cours non dispensés en présence pendant la période de confinement a été atteint à 95 %. En trois mois, le nombre de cours mis en ligne est passé de 170 à 750.

Grâce à l’engagement et la solidarité des différents acteurs (le décanat, les enseignants, les apprenants, l’équipe ELSOLC+FMT et l’équipe responsable de l’enseignement en ligne – Fig. 2), la plateforme d’enseignement en ligne a été adoptée par les enseignants et les apprenants.

thumbnail Fig. 2

Représentation de l’interaction entre les différents acteurs pour l’adoption de la plateforme.

Points forts

Le contenu des cours et la communication permanente avec les enseignants et avec les apprenants a permis de renforcer la motivation intrinsèque et extrinsèque des uns et des autres [3]. Les cours ont été élaborés en respectant la charte graphique tout en diversifiant les ressources pour atteindre les objectifs du programme académique et s’adapter aux besoins et respecter les choix des différents apprenants [2,4]. Ils étaient en majorité à type de diaporama de CIAP commenté [1] et de courte durée. Ils ont comporté des cas cliniques et des QCM accompagnés de corrections et d’explications théoriques. Certains enseignants ont inséré des vidéos et des films d’animation d’origine interne ou externe. D’autres cours ont également comporté des publications scientifiques et des liens de sites professionnels.

Parmi les apprenants, 80 % ont eu accès à la plateforme avant la fin du confinement. Grâce au feedback des apprenants, certains cours en ligne ont été améliorés (en cas de problème de son ou d’incompatibilité) et de la reconnaissance a été exprimée aux enseignants. Ceci a témoigné de l’impact positif de la plateforme et du renforcement du sentiment d’appartenance.

La plateforme a également été bénéfique lors de la reprise de l’enseignement en présence le 11 mai. En effet, les enseignants ont continué à mettre en ligne les cours à la faveur des étudiants, étrangers et ceux habitant des régions éloignées du pays, qui ne pouvaient pas se déplacer à la faculté.

Points faibles

L’un des points faibles de ce projet est que seuls 13 % des cours mis en ligne étaient destinés aux apprenants du PCEM, d’où la nécessité de motiver et de renforcer la formation des enseignants des sciences de base du PCEM et de les encourager à produire des supports de cours attractifs [3,4].

Concernant les apprenants, peu d’étudiants ont participé au forum de communication. Ils ont majoritairement choisi d’adresser des e-mails pour poser des questions aux enseignants. D’autre part, parmi les apprenants, 20 % n’ont pas accédé à la plateforme. En effet, certains étudiants ont préféré assister aux cours en présence puis consulter la plateforme durant la période de révision. Afin de garantir l’équité et respecter les choix des apprenants, les cours en présence ont repris le 11 mai sous forme de séances de CIAP ou bien de séances de révision.

Conclusion

Grâce à l’engagement et la solidarité des différents acteurs, ce projet a eu un impact scientifique, social et économique, en garantissant la continuité pédagogique et en encourageant l’auto-apprentissage par des moyens innovants. Ce projet a également permis de préserver la santé mentale des étudiants tunisiens et étrangers de la faculté. Cependant, une réflexion est nécessaire pour la mise en ligne des cours du PCEM. Par ailleurs, l’enseignement en ligne serait une solution intéressante pour les professionnels de la santé, dans le secteur du développement professionnel continu prodigué à la faculté.

Références

  1. Charfi R, Ben Hamida E, Klouz A, Trabelsi S, Loueslati MH. Progress and assessment of a contextualized teaching session of pharmacology. Tun Med 2018;96:129‐34. [Google Scholar]
  2. Jin J, Bridges S. Educational technologies in problem-basedlearning in health sciences education: A systematic review. J Med Internet Res 2014;16:e251. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  3. Marchand L. Pour une éducation médicale avec apprentissage en ligne. Pédagogie Médicale 2002;3:180‐7. [CrossRef] [EDP Sciences] [Google Scholar]
  4. Orsini C, Evans P, Jerez O. How to encourage intrinsic motivation in the clinical teaching environment? A systematic review from the self-determination theory. J Educ Eval Health Prof 2015;12:8. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]

Citation de l’article : Charfi R., Cheikhrouhou S., Labbene I., Jouini M. Enseignement médical en ligne solidaire durant la pandémie de COVID-19. Pédagogie Médicale 2020:21;241-243


© SIFEM, 2020

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Contenu d’un cours en ligne.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Représentation de l’interaction entre les différents acteurs pour l’adoption de la plateforme.

Dans le texte

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